déco Ornez Les Frontières

Paru en février 2019 dans la Gazette d'ici et d'ailleurs

Quand j’étais petit, les quelques fois que j’ai pu traverser la frontière franco-allemande, j’ai pu voir quelque chose qui m’a étonné à l’époque. Pour un petit, une frontière internationale; c’est quelque chose. Il y aurai des barrages, des agents de police qui t’observeront, des soupçons de contrebande, des formalités

Donc. Je me souviens que, en approchant cette frontière, mon cœur battait un peu en anticipation. Il arrive le poste de police côté Allemand – déserté.
Lentement, la voiture avance puis le poste français et quatre hommes en uniformes panachés, en discussion.
Un allemand jette un œil en notre direction, puis fait signe d’avancer, puis continue son discours avec le collègue français.

Perdu

Bof. C’est ça ?

Ben oui ! *!!@??$&!/§ !! (imaginez des insultes terribles. En Italien c’est plus joli. En Portugais c’est trop joli). Et vous me l’avez volez ! Quel bande de

Aujourd’hui, quand je m’approche de la frontière franco-allemande
Ben non. Trop tard, c’était ça fait quelques minutes et tu n’as rien remarqué ! Un ancien poste a été transformé en siège d’association, et qui sait – peut-être les agences de polices des deux côtés (ou leurs enfants) font parti des pêcheurs qui s’y donnent rendez-vous. Car, ils parlent déjà la même langue !

Gagné

Je me suis rendu compte que quelques années plus tard : Ce que j’avais en tête, plus jeune, était la perversion d’une frontière. D’une frontière spécifique, certes, celle entre la Lorraine et la Sarre, pendant que la réalité et les nécessités étaient évidemment bien compris par ces agents de police longtemps avant les accords de Schengen.

Et maintenant ? Ben rien.

Si je me concentre bien, le moment que je traverse cette ligne imaginaire (pourquoi que imaginaire, d’ailleurs ?), mon cœur saute. D’accord : Il saute aussi, parce que tout saut, tout mon corps parce qu’il n’a pas le choix, étant enfermé dans la voiture qui saute, elle-même, parce que côté allemand, les autoroutes sont – tout à coup – en état pitoyable et je peux, en fait, fermer les yeux et encore remarquer le moment Mais imaginons que ce n’était pas le cas.

Je veux quand même célébrer :

Mon père a traversé cette frontière accompagné d’une jolie mitrailleuse et son extra-canon, parce qu’il a fallu alterner entre deux canons toutes les quelques minutes, quand le machin chauffait tellement qu’il se déformait et cibler n’était plus possible.

Mais déjà avant 39. Est-ce que je me trompe ou est-ce que nous étions en guerre intermittent pratiquement pendant quelque chose comme mille ans c’est à dire depuis que les tueries commençaient d’être mieux organisées après que ces deux frères ont décidé de taper sur le troisième etc. etc..? Et aujourd’hui ?

Ben. Rien.

Tu passes là quelque part et bon rien. Depuis quand ? Trente –, quarante ans ? C’est bon ? Et on s’en fiche, quoi ? Ça va pas la tête ? Mais franchement ! Je veux des fanfares, je veux des tambours, je veux qu’un chorale m’accueille à chaque fois ! P***** m**** !!!

Une Frontière

Une frontière mes amis ! Une frontière – ça sert à être traversée ! C’est le moment de reconnaître l’autre. C’est après ici que tes idées et tes expériences devient inappréciables ! C’est dès maintenant que tu peux attendre des surprises, des nouvelles manières de faire, des réponses à des questions sans réponse et des questions que tu ne t’es jamais posées mais qui illuminent.

Ça n’a jamais changé, c’était toujours comme ça. Mais vous vous rendez compte ? Quel abus, quel gaspillage. Ne faites pas que les générations futurs y ajoutent l’ignorance. Célébrez les frontières, ornez-les, fêtez chaque traversé, riez, dansez comme des fous; car c’est quand même fou. Non ? Ω